PETITS GESTES : QUELS IMPACTS ?

PETITS GESTES : QUELS IMPACTS ?
Infographie de l'impact Carbonne des petits gestes du quotidien

Est-il vain de changer ses comportements si l’on souhaite résoudre la crise écologique ? La responsabilité des consommateurs et l’écocitoyenneté occupent le devant du discours médiatique sur l’écologie. Nous nous proposons d’alimenter le débat en estimant l’impact qui peut être attendu des changements de comportements individuels dans la lutte contre le changement climatique. Nous nous appuierons largement sur le rapport Faire sa part ?, publié par Carbone 4 en 2019.


L’empreinte carbone : de quoi parle-t-on ?


Afin d’estimer l’impact d’un individu sur le réchauffement climatique, la métrique la plus souvent utilisée est « l’empreinte carbone ». Pour l’obtenir on divise l’ensemble des émissions de gaz à effet de serre (GES) dont un pays est responsable par le nombre d’habitants de ce-dernier. Contrairement à « l’inventaire national » qui se limite aux GES directement émis sur le territoire national, l’empreinte carbone tient compte des GES liés aux importations ou aux vols internationaux.

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Mauvaise nouvelle : jusqu’ici notre empreinte carbone n’a pas amorcé le début d’un déclin. L’inventaire national diminue quant à lui progressivement à mesure que le pays se désindustrialise Rien d’étonnant à ce que vous ayez entendu parler d’une baisse des émissions françaises : les gouvernements successifs préfèrent communiquer sur l’inventaire national pour pointer le succès en trompe-l’œil de leur action politique. Cependant, c’est une erreur logique grave, car le changement climatique ne connait pas de frontière et les GES dont nous sommes responsables ont le même impact qu’ils soient émis sur le territoire national ou ailleurs dans le monde.
L’empreinte carbone moyenne d’un Français était en 2017 de 10,8 tonnes équivalent CO₂ (tCO₂e). C’est un beau chiffre, mais concrètement quelle est l’ampleur de la réduction à laquelle nous devons parvenir ? Dans l’objectif de limiter le réchauffement climatique à 2°C, nous devons parvenir à une empreinte carbone de 2 tCO₂e par habitant par an d’ici 2050. Autrement dit, diviser nos émissions par un quasi facteur six. Pour atteindre une telle réduction, pas de solution miracle, nous devons nous attaquer conjointement à l’ensemble de nos postes d’émissions.

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Quelle est la réduction de l’empreinte carbone individuelle grâce aux changements de comportement ?


Afin d’estimer l’impact maximal que peuvent avoir les gestes individuels, hors investissements, nous pouvons comptabiliser l’impact des petits et grands écogestes revenant fréquemment dans les discours (manger végétarien, ne plus prendre l’avion, acheter d’occasion,…). En supposant que l’ensemble de la population les applique, nous pourrions arriver à une réduction notable de 2,8 tCO₂e par habitant par an.

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Le passage d’un régime alimentaire carné à un régime végétarien est l’action individuelle à plus fort impact en permettant d’éviter les émissions liées à l’élevage. Ce changement de comportement alimentaire représente 40% du total de la réduction de GES activable au niveau individuel. Ce graphique doit néanmoins être nuancé quand il s’agit de prendre des décisions à l’échelle individuelle. Si la suppression de l’avion représente une baisse d’émissions de 270 kg CO₂e par habitant et par an, il s’agit d’une moyenne et beaucoup de personnes ne prennent pas l’avion et ne sont pas en mesure d’activer ce levier. Seuls en sont responsables ceux qui le prennent et ont la capacité d’y renoncer. Individuellement, renoncer à un aller-retour Paris-New-York représente ainsi une économie de plus d’une tonne CO₂e, soit à peu près le résultat de vos efforts annuels pour être végétarien.


Quel impact au niveau de notre société ?


Si toute la population française adoptait ce type de comportement que beaucoup jugeront « héroïque », nous pourrions réduire nos émissions de 2,8 tCO₂e/an, sur la baisse de 9 tCO₂e/an requise pour maintenir le réchauffement climatique sous les 2°C. Tout au plus, nous pourrions espérer réduire notre empreinte carbone nationale de 25%. Il nous faudrait encore trouver 6 tCO₂e/an d’économie pour atteindre les objectifs de l’Accord de Paris.

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En faisant preuve de réalisme, on ne peut considérer que l’ensemble de la population consentira à ses efforts. Suivant l’hypothèse raisonnable que 20% des Français sont moteurs sur le sujet climatique, 60% ont une attitude « variable » sur la question et que 20% sont réfractaires aux changements de comportements liés aux questions environnementales, Carbone 4 estime que l’impact des changements de comportements à l’échelle du pays pourrait stagner autour de 5% à 10% de baisse de l’empreinte carbone.


Alors on fait quoi ?


Sur la base de quelques actions personnelles, nous sommes en mesure de réduire d’un quart notre empreinte personnelle, ce qui est considérable. D’autant que nous sommes aujourd’hui les seuls à pouvoir activer les leviers liés à notre consommation. Par ailleurs, à travers nos actions individuelles, nous bâtissons des alternatives et une culture de la sobriété enthousiasmante qui contribue à rendre un futur sobre plus désirable.

Toutefois il serait vain, voire dangereux, de prétendre résoudre le problème climatique à partir des seules injonctions aux changements individuels. Nous sommes contraints par le système socio-technique dans lequel nous évoluons. Notre urbanisme est construit pour la voiture, notre industrie et même notre agriculture sont totalement dépendantes du pétrole, nos aspirations sociales sont fondées sur la promesse d’une énergie fossile abondante et bon marché. C’est seulement collectivement que nous pouvons transformer radicalement la société. La logique de responsabilité individuelle doit être assortie d’une logique de revendication et de construction collective. La relative modestie de notre impact individuel peut être pris avec enthousiasme puisqu’elle nous rappelle que nous sommes dépendants les uns des autres et que c’est seulement ensemble que nous pourrons répondre à l’urgence climatique.

C.R.

Source :
Faire sa part ?, pouvoir et responsabilité des individus, des entreprises et de l’Etat face à l’urgence climatique, C. Dugast et A. Soyeux, Carbone 4, Juin 2019
Etude Epe ZEN 2050 – Imaginer et construire une France neutre en carbone
Site du CITEPA

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